Solitude senior : 3 types à distinguer + 4 solutions efficaces validées

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Près de 2 personnes âgées sur 3 présentent une solitude dite modérée et 1 sur 3 une solitude sévère. Paradoxalement, les personnes vivant en institution seraient plus susceptibles d'être sujettes à la solitude.
– Grover S. Loneliness in elderly: A mini-review. Consortium Psychiatricum. 2022;3(1):30-36.

Pourquoi la solitude touche-t-elle autant les personnes âgées ?

La solitude touche aujourd'hui de nombreuses personnes âgées et préoccupe tant les familles que les professionnels de santé. Son importance grandissante a même conduit certains gouvernements à nommer des ministres dédiés à cette question. Comprendre les différents visages de la solitude et savoir distinguer les formes normales de celles qui deviennent problématiques représente un enjeu essentiel pour mieux accompagner nos aînés.

Quels sont les 3 types de solitude selon la durée ?

La solitude ne se présente pas toujours sous la même forme. Les chercheurs distinguent plusieurs types selon leur durée et leurs causes.

1. Solitude passagère (normale)

La solitude passagère correspond à des moments de solitude de courte durée que tout le monde ressent occasionnellement. Elle fait partie de l'expérience humaine normale et ne présente aucun caractère inquiétant.

2. Solitude situationnelle (temporaire)

La solitude situationnelle survient lors d'événements particuliers : un veuvage récent, un déménagement ou une hospitalisation. Cette forme temporaire se résout généralement avec le temps et un accompagnement approprié.

3. Solitude chronique (préoccupante)

La solitude chronique persiste plus de deux ans et s'accompagne d'une insatisfaction durable concernant les relations. Cette forme inquiète le plus les professionnels en raison de ses conséquences sur la santé.

Selon les relations concernées

La solitude intime survient après la perte d'un proche très significatif. Elle correspond à l'absence de cette personne sur laquelle on comptait pour un soutien émotionnel fort.

La solitude sociale résulte du manque de liens avec la famille et les amis proches. Ces relations de proximité apportent habituellement soutien et sentiment d'appartenance.

La solitude collective traduit l'absence de liens avec des personnes partageant des centres d'intérêt communs, même si ces relations restent moins intenses.

La solitude peut-elle être bénéfique ?

Cette question mérite une réponse nuancée. Les chercheurs font une distinction claire entre deux expériences différentes.

La solitude choisie : une expérience positive

Contrairement à la solitude douloureuse, la solitude choisie constitue une expérience positive. La personne décide délibérément de passer du temps seule et peut y mettre fin quand elle le souhaite. Ces moments permettent la réflexion, la détente et la ressource personnelle.

Cette forme volontaire se caractérise par plusieurs éléments : elle relève d'un choix personnel, procure paix et tranquillité, et la personne garde le contrôle sur la situation. Loin de constituer un problème, cette capacité à être bien seul témoigne souvent d'un équilibre psychologique sain.

Les bénéfices potentiels

Les périodes de solitude choisie permettent aux personnes âgées de se reconnecter avec elles-mêmes, de faire le bilan de leur vie ou simplement d'apprécier des moments de calme. Cette forme de solitude favorise une introspection constructive.

Cependant, les recherches se concentrent principalement sur la solitude problématique. Les études manquent encore pour mesurer précisément les bénéfices de la solitude choisie chez les personnes âgées.

Quand la solitude devient-elle problématique ?

Reconnaître le basculement d'une solitude normale vers une forme problématique constitue un enjeu important pour l'entourage.

Les facteurs de risque

Plusieurs événements peuvent transformer une solitude passagère en expérience chronique douloureuse :

Les signaux d'alarme

Certains signes alertent sur une solitude qui devient problématique. Le sentiment d'être rejeté par les autres constitue un indicateur préoccupant. La perte de contrôle sur la situation représente également un signal d'alarme : quand la personne ne peut plus choisir de rompre son isolement ou quand les périodes solitaires s'allongent involontairement.

Quel est l'impact de la solitude sur la santé ?

La solitude chronique entraîne des conséquences importantes sur la santé. Son impact a été comparé à celui du tabagisme de 15 cigarettes par jour.

Sur la santé physique

La solitude augmente le risque de maladies cardiovasculaires, d'accident vasculaire cérébral, de diabète et d'arthrite. Elle s'associe également à un taux de cholestérol élevé et à un affaiblissement du système immunitaire.

Les comportements induits aggravent ces risques : diminution de l'activité physique, troubles du sommeil, malnutrition, augmentation du tabagisme et de la consommation d'alcool.

Sur la santé mentale

La solitude constitue un facteur de risque majeur pour la dépression et l'anxiété. Elle augmente également le risque de développer une maladie neurocognitive et s'associe à une hausse des pensées suicidaires.

Des données récentes montrent aussi un lien avec l'utilisation problématique d'Internet chez les personnes âgées.

Quelles sont les 4 solutions efficaces validées scientifiquement ?

Face à ces conséquences, plusieurs approches ont montré leur efficacité pour accompagner les personnes souffrant de solitude.

Les 4 approches efficaces

Quatre types d'interventions donnent de bons résultats :

L'approche la plus efficace

Travailler sur les pensées négatives constitue l'intervention la plus efficace. Cette approche aide les personnes à reconnaître leurs idées automatiques négatives sur les autres et à les considérer comme des hypothèses à vérifier plutôt que comme des vérités. Cette démarche permet de modifier les perceptions qui entretiennent la solitude.

Les interventions individuelles montrent une efficacité supérieure aux approches de groupe, soulignant l'importance d'une personnalisation selon chaque situation.

Approches complémentaires

D'autres techniques offrent des résultats encourageants : méditation, thérapie par le rire, visites d'animaux, rencontres amicales avec des bénévoles, ou encore animations par visioconférence.

Quand consulter un gériatre ?

Il convient de consulter un gériatre lorsque la solitude persiste, s'accompagne de tristesse durable, limite les activités quotidiennes ou inquiète l'entourage. Un accompagnement précoce permet d'éviter l'installation d'une solitude chronique.

 

Questions fréquentes

Comment différencier solitude choisie et solitude subie ?

Solitude choisie : décision personnelle, peut être interrompue à volonté, procure paix/ressourcement, sentiment contrôle préservé. Solitude subie : imposée circonstances, difficile/impossible interrompre, génère souffrance/tristesse, sentiment impuissance. Clé : capacité choisir durée et fin solitude. Si doute : observer si plaintes récurrentes ou sérénité.

Mon proche vit seul mais dit ne pas être seul, est-ce possible ?

Oui, totalement. Vivre seul ≠ être seul. Différence cruciale : isolement objectif (nombre contacts) vs solitude subjective (sentiment manque). Personne seule avec réseau social satisfaisant (amis, voisins, associations, famille proche émotionnellement) peut se sentir parfaitement entourée. Qualité relations > quantité contacts.

Les réseaux sociaux et Internet peuvent-ils réduire la solitude ?

Oui ET non. Bénéfices : maintien liens famille éloignée, groupes intérêt commun, visioconférences réduisent isolement géographique. Risques : utilisation excessive = addiction, remplace contacts réels, comparaison sociale négative. Optimal : Internet complément (pas remplacement) relations réelles. Formations seniors recommandées pour usage approprié.

Combien de temps après un deuil la solitude devient-elle anormale ?

Pas de délai fixe. Deuil normal : amélioration progressive 6-18 mois, capacité retrouver plaisir activités, acceptation perte. Solitude pathologique post-deuil : pas amélioration après 12-18 mois, retrait social persistant, refus nouvelles relations, dépression associée. Consultation gériatre recommandée si stagnation après 6 mois.

Quelles activités concrètes proposer à un proche souffrant de solitude ?

Adapter selon mobilité/intérêts : 1) Clubs seniors (gymnastique douce, jeux, sorties), 2) Bénévolat associations (transmission expérience), 3) Ateliers créatifs (peinture, écriture), 4) Jardinage partagé, 5) Cours informatique/tablette, 6) Visites musées/cinéma, 7) Cafés rencontres intergénérationnels. Commencer doucement (1 activité/semaine), respecter refus, valoriser essais.

 

À retenir : préserver bénéfices, réduire risques

La solitude chez les personnes âgées présente de multiples visages, allant de formes bénéfiques de solitude choisie à des expressions problématiques aux conséquences importantes. Touchant jusqu'à 60% des personnes âgées, elle nécessite une approche nuancée et personnalisée. Les interventions efficaces, notamment celles ciblant les pensées négatives, offrent des perspectives encourageantes. L'enjeu consiste à sensibiliser l'entourage à ces distinctions pour proposer un accompagnement adapté qui préserve les bénéfices de la solitude choisie tout en prévenant ses formes problématiques.

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Références

À propos des auteurs

Dr Eric MAEKER
Dr Eric MAEKER
Médecin Gériatre
Médecin gériatre et psychogériatre, spécialisé en soins palliatifs gériatriques. Fondateur et président de l'association Emp@thies dédiée à l'humanisation des soins. Membre des comités pédagogiques de l'Université Sorbonne. Auteur de publications scientifiques sur l'empathie médicale, les troubles neurocognitifs et la communication thérapeutique. Directeur de plus de vingt mémoires universitaires.

Bérengère MAEKER-POQUET
Bérengère MAEKER-POQUET
Infirmière Diplômée d'État
Infirmière diplômée d'État avec plus de quinze ans d'expérience hospitalière. Co-fondatrice et secrétaire de l'association Emp@thies. Co-auteure de publications scientifiques sur l'empathie médicale, l'annonce diagnostique et les soins centrés sur la personne. Formatrice en soins relationnels et accompagnement humaniste des personnes âgées.

 

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